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 Transhumanisme et Génétique humaine

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MarcAdmin
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MessageSujet: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitimeLun 6 Oct - 20:52

Tiré du site de l'observatoire de la génétique"

Lien vers la page

No 16 - mars-avril, 2004


Transhumanisme et génétique humaine


Les transhumanistes représentent-ils simplement une secte d’illuminés technophiles issus de la classe moyenne, en mal d’ascension sociale et de sensations fortes? Le rêve d’un être humain programmable à l’image mécaniste d’un logiciel d’ordinateur et produit par des techniques de sélection, d’élimination ou de manipulation biologique, que les éleveurs appliquent aux espèces animales, n’est-il pas fantasmagorique? Raisonner ainsi signifierait sous-estimer un courant de pensée qui prend de l’ampleur et qui a surtout conscience du moment historique que nous vivons sur les plans tant technique qu’idéologique.
Klaus-Gerd Giesen*


Le moins que l’on puisse dire est que l’humanisme se trouve de plus en plus sous le feu croisé, et nourri, de plusieurs idéologies émergentes, et les étonnants progrès de la génétique humaine n’y sont pas pour peu. Moult fois déclaré mort depuis Nietzsche et Heidegger il fait notamment l’objet de critiques acerbes de la part de ceux qui se réclament du transhumanisme. Les premières manifestations de ce courant de pensée remontent au début des années 1980, bien que l’adjectif «transhumaniste» ait déjà été utilisé en 1966 par le futuriste américano-perse F.M. Esfandiary, alors qu’il enseignait à la New School of Social Research de New York, ainsi que dans les ouvrages d’Abraham Maslow, Toward a Psychology of Being (1968), et de Robert Ettinger, Man into Superman (1972).

Cependant, ce fut la rencontre en Californie du Sud entre Esfandiary, qui connut une audience grandissante sous le pseudonyme mythique de FM-2030, l’artiste Nancie Clark, qui agit à présent sous le nom d’emprunt de Natasha Vita-More, John Spencer de la Space Tourism Society, puis plus tard le légendaire Britannique Max More (jadis Max O’Connor), qui provoqua les premières tentatives de systématisation de ce qu’il faut bien appeler une idéologie en plein essor. Environ une décennie plus tard, avec l’arrivée de philosophes universitaires tels que le Suédois Nick Bostrom, qui enseigne à l’Université d’Oxford, et les Anglo-saxons David Pearce, Richard Dawkins et James Hughes, le courant avait atteint une masse critique suffisante pour s’insinuer dans le débat académique. Parallèlement, certains adeptes avaient institutionnalisé la nouvelle doctrine, en publiant des revues telles que Extropy, avec 5,000 abonnés, et le Journal of Transhumanism, en fondant des associations aux niveaux international (Extropy Institute, ainsi que la World Transhumanist Association avec 2,000 membres) et national (Aleph en Suède, Transcedo aux Pays-Bas, etc.), tout en s’organisant virtuellement autour d’une multitude de forums de discussion et de listes de diffusion sur Internet, ainsi que par les désormais célèbres colloques bisannuels «Extro».


Au-delà de la condition humaine

En quoi consiste donc cette idéologie de moins en moins underground car alimentant de plus en plus le débat autour de l’acceptabilité sociale de la génétique humaine (et d’autres technologies nouvelles)? En tout premier lieu, le transhumanisme annonce que l’humanisme classique est désormais dépassé. Dans la dernière version de sa Déclaration transhumaniste, l’Institut Extropy de Max More proclame: «Nous allons au-delà de beaucoup d’humanistes en ce que nous proposons des modifications fondamentales de la nature humaine en vue [...] de son amélioration (1).» La nature humaine ne serait donc pas fixée une fois pour toutes. Elle changerait, et serait même appelée à muter. Le propre du monde des humains, par opposition à celui des animaux, étant précisément la faculté non seulement d’utiliser mais encore de concevoir des outils techniques afin de pallier à ses énormes insuffisances naturelles et d’adapter son milieu à ses désirs (et non pas l’inverse), il conviendrait que l’humanité prenne technologiquement en charge son destin. Cela signifierait qu’elle rompe avec le processus de sélection naturelle mis en évidence par Darwin et qu’elle forge son évolution sur le mode volontariste jusqu’à dépasser la condition humaine: «L’humanité ne doit pas stagner. [...] L’humanité est une étape provisoire sur le sentier de l’évolution. Nous ne sommes pas le zénith du développement de la nature (2).»

L’humanisme se présentant le plus souvent comme une «proposition philosophique qui met l’homme et les valeurs humaines au-dessus des autres valeurs» (3), les défenseurs du transhumanisme partagent avec les «antispécistes», du moins dans un premier temps, l’hypothèse darwiniste selon laquelle la distinction entre l’être humain et l’animal ne serait qu’une question de degré et non de nature, et la hiérarchisation humaniste n’aurait donc aucun fondement biologique. En effet, ils dénoncent les uns comme les autres l’emprise du naturalisme sur notre vision hiérarchisée du monde - dans le sens où l’on parle d’«ordre naturel» ou d’«équilibre naturel» pour justifier la domination de l’humain sur l’animal (4) - et placent l’être humain sur une échelle généalogique continue, c’est-à-dire abrogent toute barrière définitive entre les espèces évoluées. Cependant, cette thèse moniste est aussitôt relativisée par l’introduction d’une nouvelle opposition dualiste, cette fois entre l’être humain et l’être posthumain à venir (5): les transhumanistes prônent sinon un devoir, du moins un droit d’intervenir dans le cours des événements. Pour ce faire, l’être humain doit s’intégrer à la technosphère et tirer, pour son «autoévolution» accélérée, tout le potentiel de l’intelligence artificielle, des nanotechnologies, des neurotechnologies, de la robotique et surtout de la génétique humaine (6).

L’un des objectifs à long terme des transhumanistes consiste à combattre la mortalité humaine pour réaliser enfin le vieux rêve d’immortalité de l’être humain. Selon eux, on y réussira par la transformation post-darwiniste de l’espèce humaine en un genre perfectionné qui se serait débarrassé de toute animalité. Ecoutons Nick Bostrom: «Un jour nous aurons l’option d’étendre nos capacités intellectuelles, physiques, émotionnelles et spirituelles très au-delà des niveaux qui sont possibles aujourd’hui. Ce sera la fin de l’enfance de l’humanité et le début d’une ère posthumaine (7).»


La programmation génétique de l’homme-machine


Pour y parvenir, Bostrom n’hésite pas à recommander vivement ce qu’il appelle «l’ingénierie des cellules souches» (manipulations germinales) et le clonage reproductif. A force de vouloir apporter des améliorations et des reprogrammations à l’être humain - par analogie avec les versions successives d’un logiciel d’ordinateur - l’auteur perpétue la métaphore foncièrement antihumaniste de l’homme-machine, ainsi que le mythe d’un progrès infini (Cool. Hormis que l’humain n’est plus destiné à devenir meilleur par l’éducation (humaniste), et le monde par des réformes sociales et politiques, mais simplement par l’application de la technologie à l’espèce humaine. Nous y trouvons aussi le vieux fantasme eugéniste selon lequel la valeur intrinsèque d’un être humain se mesure à l’aune de la qualité de sa base héréditaire. Raisonnant, comme la plupart des philosophes transhumanistes, en termes purement utilitaristes, Bostrom écrit: «Très probablement il y aura quelques conséquences négatives de l’ingénierie germinale humaine qui ne peuvent être ou ne seront pas anticipées. Inutile de dire que la seule existence d’effets négatifs n’est pas une raison suffisante pour ne pas y procéder. Toute technologie majeure [...] a quelques conséquences négatives, y compris quelques conséquences imprévues. Et il en va de même pour le choix de préserver le status quo. Ce n’est qu’après une comparaison équitable des risques et des probables conséquences positives que l’on peut parvenir à une conclusion fondée sur une analyse en termes de coûts-bénéfices (9).» James Hughes approuve, lui aussi, le recours à l’approche utilitariste des coûts et des bénéfices lorsqu’il s’agit d’évaluer prospectivement un upgrade génétique (10).

De toute façon, nous prévient Bostrom, «un clone humain serait une personne unique méritant autant de respect et de dignité que n’importe quel autre être humain» (11). Toute résistance de principe (déontologique) à de tels procédés techniques serait particulièrement mal venue lorsqu’elle se fonde sur les supposées difficultés de l’enfant à naître: «Peut-être le rehaussement [enhancement] germinal conduira à plus d’amour et d’attachement parentaux. Peut-être certains pères et mères trouveront plus facile d’aimer un enfant qui, grâce aux améliorations [génétiques], sera brillant, beau et en bonne santé (12).» Nous découvrons ici l’eugénisme hyperindividualiste - les transhumanistes s’opposant avec virulence à toute régulation politique de la génétique humaine et donc à l’eugénisme collectif - et le modèle consumériste qui président à leur idéologie. Certains, à l’instar de James Hughes, mobilisent même une image qui annonce sans équivoque la nouvelle ère: «Si vous sélectionnez, sur catalogue, la plupart des gènes de votre enfant, cette sélection renforcerait probablement l’importance de vos liens parento-sociaux avec vos enfants (13).»

L’amour que les parents porteront à leur enfant-produit obtenu sur commande sera donc directement fonction des désirs et attentes que les premiers inscrivent dans les «options» et les «accessoires» d’un corps de progéniture ramené au rang de matériau et dépourvu de toute signification symbolique. Au-delà de la référence consumériste se dessine, plus en profondeur, le principe hédoniste, explicitement évoqué par David Pearce (14), exaltant les plaisirs de l’immédiateté et du corps. Or, ce principe se transmue aussitôt en un eugénisme de la normalisation, car depuis Canguilhem et Link nous savons que chaque époque et ses imaginaires dominants produisent une normalité spécifique (15). Comme le remarque à juste titre Jacques Ricot, «alors que l’aléatoire de la naissance garantissait jusqu’à présent l’altérité, l’intervention technique dans la fécondation [et a fortiori dans la base génétique] laisse entrevoir une possible maîtrise de l’homme actuel sur les hommes à venir (16).»
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MessageSujet: Re: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitimeLun 6 Oct - 20:52

Gnose eschatologique et inégalitarisme néolibéral

Un autre effet pervers de ce déterminisme génétique, qui décidément semble gagner du terrain aujourd’hui, réside dans le fait que l’autoproduction de l’homo sapiens est appelée à se fonder entièrement sur l’altruisme individuel (17). Après tout, en matière de reproduction les «parents» du futur n’effectueraient leurs choix individuels que de façon hautement responsable. La Déclaration transhumaniste de More l’explique: «La responsabilité et l’autonomie personnelles vont de pair avec l’autoexpérimentation. Les extropiens [comme les transhumanistes américains se nomment eux-mêmes] prennent la responsabilité pour les conséquences de leurs choix. [...] L’expérimentation et l’autotransformation exigent la prise de risques; nous souhaitons être libres d’évaluer les éventuels risques et bénéfices pour nous-mêmes, de procéder à nos propres jugements et d’en assumer la responsabilité en ce qui concerne les résultats. Nous nous opposons vigoureusement à toute coercition de la part de ceux qui tenteraient d’imposer leurs jugements en matière de sécurité et d’effectivité des différents moyens d’autoexpérimentation. [...] La protection paternaliste de l’individu est inacceptable pour nous. [...] Comme l’autodétermination s’applique à tout un chacun, ce principe exige que nous respections l’autodétermination des autres (18).» Dès lors, les transhumanistes transposent l’approche néolibérale de l’économie à la génétique humaine: une sorte de main invisible régulerait automatiquement les microdécisions individuelles et garantirait les mutations successives de l’espèce humaine vers une nouvelle espèce. Nous avons en effet affaire à la parabole d’un marché autorégulateur qui, là aussi, supprime la sphère politique, c’est-à-dire les décisions collectives.

Il est vrai que les transhumanistes sont dans leur immense majorité des libertarians anarcho-capitalistes convaincus des seules vertus du marché, et que les œuvres du théoricien néolibéral Friedrich von Hayek figurent sur pratiquement toutes les listes de lectures recommandées. Mais leurs inégalitarisme décomplexé et méritocratie implacable se réduisent en réalité à un fétiche biologique: le désespoir de trouver des solutions sociales et politiques à nos problèmes sociopolitiques d’aujourd’hui les incite à tout ramener au gène héréditaire, en tant que fantasme de la toute-puissance retrouvée de l’individu, quitte à métamorphoser le sujet (humain) en projet (posthumain).

Véritable messianisme de substitution, elle est, comme le note Jean-Claude Guillebaud, «devenue l’idéologie par défaut. En désespoir de cause, c’est à elle qu’on a confié toutes les attentes et utopies qui habitent naturellement l’esprit des hommes: la connaissance parfaite, la divination (la «prédictabilité» génétique), la métamorphose magique (les manipulations), la transformation prométhéenne, etc. (19).» Plus encore il s’agit, selon Dominique Lecourt, d’une véritable gnose, car «ce que proclament aujourd’hui tout haut les techno-prophètes américains dans leur étrange style néo-biblique qui les rapproche des télé-évangélistes, c’est qu’ils tiennent l’application des sciences à la technique pour une tâche sacrée susceptible de permettre à l’être humain de surmonter les conséquences de la Chute, de le préparer à la rédemption et de retrouver le bonheur d’Adam au paradis terrestre (20).»

Enfermant la figure du surhomme nietzschéen - par ailleurs une référence constante chez les transhumanistes - dans un absurde matérialisme biologique qui amuserait sans doute beaucoup le philosophe allemand, les transhumanistes poussent leur nihilisme jusqu’à «spéculer sur les membres de la strate privilégiée de la société qui amélioreront éventuellement eux-mêmes et leur progéniture à un tel point que l’espèce humaine se partagerait [...] en deux d’espèces, ou plus, n’ayant plus grand-chose en commun, à l’exception de leur histoire partagée. Les génétiquement privilégiés pourraient être sans âge, en bonne santé, des supergénies d’une beauté physique sans défaut... Les non privilégiés resteraient au niveau d’aujourd’hui, mais seraient peut-être privés d’un peu de leur estime de soi et souffriraient occasionnellement de sursauts de convoitise. La mobilité entre la classe inférieure et la classe supérieure pourrait être réduite à pratiquement zéro (21).» La force et l’originalité doctrinales résident précisément dans la combinaison inédite des deux éléments idéologiques que sont une gnose eschatologique et un néolibéralisme inégalitaire qui va jusqu’à admettre la possible émergence d’une société de castes génétiques dominée par des surhommes.


Le transhumanisme a-t-il un avenir?

Les transhumanistes représentent-ils simplement une secte d’illuminés technophiles issus de la classe moyenne, en mal d’ascension sociale et de sensations fortes? Le rêve d’un être humain programmable à l’image mécaniste d’un logiciel d’ordinateur et produit par des techniques de sélection, d’élimination ou de manipulation biologique, que les éleveurs appliquent aux espèces animales, n’est-il pas fantasmagorique? Raisonner ainsi signifierait sous-estimer un courant de pensée qui prend de l’ampleur et qui a surtout conscience du moment historique que nous vivons sur les plans tant technique qu’idéologique: «Dans la cristallisation de la biopolitique, écrit James Hughes, nous nous trouvons au même stade que la politique économique gauche-droite lorsqu’en 1864 Marx aida à fonder l’Association internationale des travailleurs [...]: les intellectuels et les activistes sont en lutte pour rendre explicites les lignes de combat émergentes, avant que les partis populaires n’aient été organisés et les masses regroupées sous leurs drapeaux (22).» Cela explique que le mouvement commence à s’organiser politiquement et à infiltrer certains mouvements sociaux. Ainsi fut par exemple fondée, en 2001 par Natasha Vita-More, la Progress Action Coalition («Pro-Act»).

Il faut y ajouter qu’en se faisant l’apôtre d’une vision extrémiste de la génétique humaine, le transhumanisme facilite objectivement l’acceptation de mesures un peu moins radicales - car ayant l’apparence de la modération - auprès d’un public occidental en rapide mutation morale, du moins à en juger par la facilité avec laquelle la procréation médicalement assistée, et notamment la fertilisation in vitro, a pu proliférer en l’espace de quelques années seulement (concernant aujourd’hui près de 1% des naissances aux Etats-Unis). C’est la fonction d’agenda-setting idéologique qui importe ici. N’oublions pas non plus que l’avant-garde transhumaniste dispose de moyens à la hauteur de ses ambitions: Marvin Minsky, le «père» de l’intelligence artificielle, Eric Drexler, l’un des pionniers des nanotechnologies, et Hans Moravec, le «pape» de la robotique, pour ne citer que ceux-ci, s’affichent ouvertement comme transhumanistes et ne renonceront pas aux expérimentations qui leur paraissent pertinentes.

Et puis, il convient surtout de ne pas perdre de vue le fait que les soubassements de l’idéologie transhumaniste s’accordent parfaitement avec l’esprit de certains milieux patronaux exigeant un accroissement constant de la productivité individuelle. Si au lieu d’intégrer toujours davantage la technique dans le processus de production, dans le but d’obtenir une progression continuelle de la performance et de la rentabilité du travailleur, on pouvait persuader celui-ci à s’intégrer à la technosphère, un véritable saut d’échelle serait réalisé en matière à la fois d’exploitation et d’aliénation...

*Université d’Auvergne / Universität Leipzig.


Références

(1) More M. Extropian Principles 3.0. A Transhumanist Declaration.

(2) More M. On Becoming Posthuman.

(3) Définition du Petit Larousse illustré.

(4) Bournadel Y. «Contre l’apartheid des espèces», in: Reus E, et al. Espèces et éthique. Darwin: une révolution à venir. Lyon: Editions Tahin Party, 2001, p. 173.

(5) Sur les thèses moniste et dualiste: Le Bras-Chopard A. Le zoo des philosophes: De la bestialisation à l’exclusion. Paris: Plon, 2000, pp. 10-12.

(6) Dawkins R. «Foreword», in: Burley J, (ed). The Genetic Revolution and Human Rights. Oxford: Oxford University Press, 1999, p. xvii.

(7) Bostrom N. Human Reproductive Cloning from the Perspective of the Future.

(8 ) Bostrom N. A Transhumanist Perspective on Human Genetic Enhancements.

(9) Ibid.

(10) Hughes J. «Embracing change with all four arms: A post-humanist defense of genetic engineering». Eubios Journal of Asian and International Bioethics1996; 6(4): 94-101.

(11) Bostrom N. A Transhumanist Perspective on Human Genetic Enhancements, op. cit.

(12) Ibid.

(13) Hughes J. «Embracing change... », op. cit.

(14) Pearce D. The Hedonist Imperative.

(15) Canguilhem G. Le normal et le pathologique. Paris: Presses Universitaires de France, 1966; Link J. Versuch über den Normalismus: Wie Normalität produziert wird. Opladen: Westdeutscher Verlag, 1999.

(16) Ricot J. Étude sur l’humain et l’inhumain. Paris: Pleins feux, 1998, pp. 93-94.

(17) Scott N. «Eugenics Perpetuated by Altruism». Science as Culture 2002; 11(4): 505-521.

(18 ) More M. Extropian Principles 3.0. A Transhumanist Declaration, op. cit.

(19) Guillebaud J-C. Le principe d’humanité. Paris: Seuil, 2001, p. 327.

(20) Lecourt D. Humain, posthumain. Paris: Presses Universitaires de France, 2003, p. 12.

(21) Bostrom N. A Transhumanist Perspective on Human Genetic Enhancements, op. cit. Il est vrai que Bostrom, tout comme d’ailleurs James Hughes (dans «The Politics of Transhumanism», Paper for the 2001 Annual Meeting of the Society for Social Studies of Sciences, Cambridge, MA, November 1-4, 2001), envisage des mesures politiques pour favoriser l’accès de tous aux technologies d’amélioration génétique. Ils sont cependant une petite minorité à accorder une telle place minimale à l’Etat.

(22) Hughes J. «Democratic Transhumanism 2.0», in: Transhumanity, April 28, 2002.
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MessageSujet: Re: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitimeJeu 9 Oct - 9:01

L'article qui nous est ici proposé est-il caractéristique de la manière dont le H+ est perçu en France ? Je n’en sais rien. Ce que je sais, c’est que j’ai eu la curiosité d’aller faire un tour sur libéraux.org, et que là, les commentaires dominants concernant le H+ est qu’en France on ne trouverait que des H+ progressistes, ce dont les commentateurs se désolent.
Pour revenir à l’article que Cyberspy nous soumet, il me semble qu’il me confirme dans mon idée qu’il y a un énorme travail devant nous. Il paraît nécessaire d’expliquer sans relâche :
- Que l’évolution H+ ne préjuge pas des orientations politiques de cette évolution.
Il est faux d’affirmer comme le fait l’article que « les transhumanistes s’opposent avec virulence à toute régulation politique de la génétique humaine » ou que « le modèle consumériste […] préside à leur idéologie. »
Cela tend à dire que tous les H+ refusent l’intervention de l’État et prônent le consumérisme, ce qui n’est pas le cas.

- Qu’il existe un H+ démocratique qui vise à assurer une transition progressive, respectueuse du droit des individus et des grands équilibres qui sont nécessaires à la société humaine.


Par contre, j’estime que l’article pose une vrai question à propos par exemple d’une procréation permettant des choix génétiques. Je me dis que le facteur aléatoire jusqu’aujourd’hui inévitable, mis à part le fait qu’il est porteur d’une inventivité difficilement égalable, garant de notre diversité génétique, nous contraint aussi à l’ouverture d’esprit. Je voulais un garçon et j’ai une fille : que faire ? Le facteur aléatoire est peut-être le meilleur garant de cette valeur qui veut qu’on aime un proche non pour ce qu’il fait, ni pour ses talents ou ses qualités, mais pour la simple raison qu’il est.

Je suis également d’accord avec la méfiance de l’auteur quant à la revendication de certains H+ de pouvoir assumer une totale liberté en matière d’expérimentation sur leur propre corps ou celui de leur descendance. Pour moi, cette liberté doit simplement être la plus grande possible dans la mesure où elle respecte les droits des autres (y compris des enfants à naître) d’une part et où elle ne provoque pas des distorsions dangereuses pour la société d’autre part. Bien entendu, le problème est qu’on a pas trouvé d’excellente solution pour définir à coup sûr et par avance ce qui est dangereux et ce qui ne l’est pas …

« les transhumanistes poussent leur nihilisme jusqu’à «spéculer sur les membres de la strate privilégiée de la société qui amélioreront éventuellement eux-mêmes et leur progéniture à un tel point que l’espèce humaine se partagerait [...] en deux d’espèces, ou plus, n’ayant plus grand-chose en commun, à l’exception de leur histoire partagée. » dit l'article.

Comme précédemment, l’auteur généralise ici une position radicale anarcho-capitaliste peut-être bien représentée dans la mouvance H+ mais pas hégémonique.
A mon sens, cette tendance est contraire aux objectifs H+ car elle porte des risques de tensions sociales qui pourraient être mortels pour d’éventuels post-humains eux-mêmes et pour la société en général.
L’auteur a donc raison, non pas en ce qui concerne le H+, mais en ce que cette tendance « anarcap » doit être combattue.

« il convient surtout de ne pas perdre de vue le fait que les soubassements de l’idéologie transhumaniste s’accordent parfaitement avec l’esprit de certains milieux patronaux exigeant un accroissement constant de la productivité individuelle. Si au lieu d’intégrer toujours davantage la technique dans le processus de production, dans le but d’obtenir une progression continuelle de la performance et de la rentabilité du travailleur, on pouvait persuader celui-ci à s’intégrer à la technosphère, un véritable saut d’échelle serait réalisé en matière à la fois d’exploitation et d’aliénation... »

Ibidem. Même identification du H+ à l’ultra libéralisme le plus débridé. Même remarque : Il nous faudra tout autant combattre les dérives totalitaires, leur risque est réel, que l’aveuglement de cette critique de gauche dont la nature bioluddite me paraît surtout irrationnelle.


NB : L’auteur collectif ou anonyme (Université d’Auvergne / Universität Leipzig ??) site à plusieurs reprise James Hugues à propos de ses positions sur les applications de la génétique. Il est surprenant qu’il ne dise mot sur son point de vue politique. Hugues me semble l’exemple parfait qui démontre que H+ n’est pas synonyme d’anarcho-capitalisme, d’ultra libéralisme ou de nihilisme. Pourquoi ces citations partielles alors ? Par ignorance ou par malveillance ?
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MessageSujet: Re: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitimeVen 10 Oct - 15:36

Je suis en désaccord à peu près complet avec cet article. Il est en effet représentatif de la manière dont on pense en France, pas seulement pour les H+ : par insinuation et simplification, avec une énorme charge moralisatrice.

Mon premier réflexe est donc : ne commençons pas par accepter le terrain des "adversaires", en se posant des problèmes qui n'existent pas aujourd'hui. Les problèmes qui existent aujourd'hui : les individus sont sous-informés sur les sciences et les techniques ; la bio-éthique est prisonnière de positions humanistes et religieuses hostiles à toute modification de l'homme ; les Etats (en Europe) freinent au maximum la diffusion des premières techniques disponibles de connaissance / modification de soi (exemple test génétique).Et non pas un fantasmatique ordre néolibéral planétaire avec des sous-hommes et des surhommes. Il faut arrêter une bonne fois pour toutes d'accorder crédit à ces scénarios de SF politiquement engagés, ayant pour seul fin de diaboliser et non de débattre.

Bref, Klaus-Gerd Giesen ferait mieux de chercher des ceps autour de son université d'Auvergne au lieu de nous gonfler avec ses resucées d'articles américains.

Marc : je suis en désaccord avec toi sur le concept de droit d'un enfant à naître. Le droit concerne une personne qui existe, plus exactement les relations entre personnes qui existent. L'enfant à naître n'existe pas : il n'a aucun droit. De même que l'embryon, qui n'est pas une personne.

Si un enfant naît malformé pour cause naturelle, on ne lui supprime pas ses droits, on le reconnaît comme être humain. Idem si, par malheur, un enfant devait subir les conséquences négatives d'une intervention humaine : il aurait toujours les mêmes droits que tout autre individu.

Sinon, je sais que plusieurs considèrent comme essentiel le débat entre anarcho-capitaliste et progressiste. Moi pas. Ce débat philosophico-politique est secondaire pour les H+ à mes yeux, on peut être H+ et être communiste, capitaliste, écologiste, ce que l'on veut. Pour ma part, je ne me définis pas comme "iste", je suis avant tout attaché aux droits fondamentaux et libertés des individus, modifiés ou non-modifiés.

PS : désolé, je viens de déménager, et dans ce merveilleux pays qu'est la France il faut quinze jours pour une connexion Internet. Mes interventions seront un peu limitées pour cette raison.
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Marc




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MessageSujet: Re: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitimeDim 12 Oct - 18:05

C. Müller à écrit :

Citation :
Mon premier réflexe est donc : ne commençons pas par accepter le terrain des "adversaires", en se posant des problèmes qui n'existent pas aujourd'hui.
Je suis bien d’accord pour dire qu’il y a déjà énormément de travail pour faire avancer ne serait-ce que les idées élémentaires de la pensée H+, mais il me semble tout aussi important d’avoir les idées claires sur la direction que le H+ se propose de suivre. Les arguments qui sont opposés au H+ doivent pouvoir être démontés de fond en comble.

Citation :
Et non pas un fantasmatique ordre néolibéral planétaire avec des sous-hommes et des surhommes. Il faut arrêter une bonne fois pour toutes d'accorder crédit à ces scénarios de SF politiquement engagés, ayant pour seul fin de diaboliser et non de débattre.

Sans accorder de « crédit » aux scénarii de SF, ne peut-on pas d’une part s’accorder sur le constat d’une tendance multiséculaire à la concentration des pouvoirs et des richesses, d’autre part rappeler simplement que le H+ est d’abord un humanisme et qu’à ce titre il promeut les droits de l’Homme au même titre que la plupart des déclarations des droits humains ?

Citation :
Marc : je suis en désaccord avec toi sur le concept de droit d'un enfant à naître. Le droit concerne une personne qui existe, plus exactement les relations entre personnes qui existent. L'enfant à naître n'existe pas : il n'a aucun droit. De même que l'embryon, qui n'est pas une personne.
Si un enfant naît malformé pour cause naturelle, on ne lui supprime pas ses droits, on le reconnaît comme être humain. Idem si, par malheur, un enfant devait subir les conséquences négatives d'une intervention humaine : il aurait toujours les mêmes droits que tout autre individu.

NB : Je suis en train de lire un essai de François Julien qui, à la lumière des pensées asiatiques notamment, met en question l’universalité des droits de l’homme. Il décortique au passage l’histoire de la notion de droit. Ce que j’en retiens à ce jour c'est que le droit est : ce que les sociétés en font.

De même, l’attribution de droits me paraît dépendre de la reconnaissance que les membres d’une société donnée, dotée de droits, accordent à une population qui lui est autre/étrangère. Hier, les Européens refusaient d’accorder la dignité humaine aux populations subsahariennes. Aujourd’hui nos sociétés refusent d’accorder des droits aux animaux ou à l’embryon (Mais le projet « Great Apes » existe et, par ailleurs, de nombreux religieux, situant leur niveau de reconnaissance à l’instant de la conception de la vie humaine, souhaitent accorder des droits à l’embryon et s’opposent à l’avortement …).

Pour ma part, quand je précisais « y compris des enfants à naître » j’aurais plutôt dû formuler un questionnement. Si je fais le libre choix de recevoir une substance, gène, implant ou que sais-je qui me donne telle particularité (avoir la peau vert fluo par exemple), dont j’assumerai toutes les conséquences en connaissance de cause, ai-je le droit d’imposer ces conséquences à ma progéniture ? Cette question n’est pas rhétorique. Je viens de relire les trente articles de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Je me rends compte ainsi qu’en fait, si la société fonctionnait bien, rien n’empêcherait de choisir pour sa descendance d’avoir une peau fluo avec des oreilles et une trompe d’éléphant (alien + elephant ?). Cela ne contredit pas en soi les droits de l’individu. A la limite, je pourrais me dire que ce ne devrait pas être un choix plus contraignant que celui d’un prénom.

Pourtant, dans la réalité, le choix délibéré de faire porter une contrainte lourde par ses enfants me semble problématique. Il me semble d’ailleurs que la loi française (qui s’est récemment ouverte sur ce sujet) interdit encore l’attribution aux enfants de certains prénoms, ceux considérés par exemple comme portant atteinte à la dignité du nouveau né. Le problème est que la définition de la dignité de l’individu est elle aussi, comme celle des bonnes mœurs, ou du droit, fluctuante.

Une fois de plus, il me semble donc que le libre choix des personnes conscientes et rationnelles doit être encadré afin de lutter contre les dérives, les abus et les excès que la liberté individuelle ne manque jamais d’entraîner.

Citation :
Sinon, je sais que plusieurs considèrent comme essentiel le débat entre anarcho-capitaliste et progressiste. Moi pas. Ce débat philosophico-politique est secondaire pour les H+ à mes yeux, on peut être H+ et être communiste, capitaliste, écologiste, ce que l'on veut. Pour ma part, je ne me définis pas comme "iste", je suis avant tout attaché aux droits fondamentaux et libertés des individus, modifiés ou non-modifiés.

D’accord pour respecter l’opinion des H+ de tous bords politiques, il me semble néanmoins difficile d’être attaché aux droits fondamentaux et libertés des individus sans lutter contre les tendances qui aboliraient ces mêmes libertés. Suivant le schéma proposé par James Hugues, je dirais que si l’axe « biopolitique » (H+/bioluddisme) est transversal, ou perpendiculaire, à l’axe politique antérieur (gauche/droite), Les H+ ne pourront s’affranchir de ce dernier débat. Dans un monde trans- ou post- humaniste, pour un long moment encore, la Politique continuera, as usual …

PS : bon courage pour le déménagement
Marc.
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MessageSujet: Re: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitimeDim 12 Oct - 22:41

Marc a écrit:
Sans accorder de « crédit » aux scénarii de SF, ne peut-on pas d’une part s’accorder sur le constat d’une tendance multiséculaire à la concentration des pouvoirs et des richesses, d’autre part rappeler simplement que le H+ est d’abord un humanisme et qu’à ce titre il promeut les droits de l’Homme au même titre que la plupart des déclarations des droits humains ?

Sur le premier point : je ne sais pas, il faudrait faire une étude chiffrée. Dans bon nombre de sociétés prémodernes, il y a moins de différences de richesses, mais plus de différences de statuts. Une récente étude a montré que la richesse est un biais favorable à la reproduction dans les sociétés pastoralistes africaines ou chasseurs-cueilleurs bien plus que dans les sociétés modernes occidentales (d'un facteur 2 à 3). Donc je ne dirais pas tendance multiséculaire à ce que les plus riches soient les plus favorisés pour la reproduction (qui est généralement le point soulevé sur le risque inégalitaire entre H+ et H-). On le voit aussi pour des choses non-reproductives comme la chirurgie esthétique : ce ne sont pas uniquement les classes supérieures américaines qui y ont recours, loin de là.
http://www.mutageneses.com/2008/10/la-survie-des-plus-riches.html

Sur le second point : je ne me définis pas comme humaniste. Défendre les droits des individus ne signifie pas adhérer à une philosophie faisant de l'homme la fin ou la mesure de toute chose.



Citation :

Pour ma part, quand je précisais « y compris des enfants à naître » j’aurais plutôt dû formuler un questionnement. Si je fais le libre choix de recevoir une substance, gène, implant ou que sais-je qui me donne telle particularité (avoir la peau vert fluo par exemple), dont j’assumerai toutes les conséquences en connaissance de cause, ai-je le droit d’imposer ces conséquences à ma progéniture ? Cette question n’est pas rhétorique.

Si, je pense que c'est rhétorique : combien de personnes connais-tu qui souhaitent se mettre la peau en vert fluo et avoir une trompe, si tant est que cela possible ? Et quand bien même un jour nous aurions la possibilité d'être vert, en quoi avoir des enfants verts pour des parents verts serait un problème ?

C'est un peu le sophisme de l'excès, applicable à tout. Prenons une technique existante, la chirurgie esthétique : sur le papier, on peut craindre que des parents utilisent cette chirurgie pour changer le visage de leur enfant, leur ôter un oeil, une oreille, un nez, ou pourquoi pas donner des seins en silicone à une fillette de 6 ans. Mais évidemment, cela ne se passe jamais ainsi, on peut sur le papier mettre tous les cas de figure imaginables et définir comme problématique toutes les techniques imaginables.


Citation :

Le problème est que la définition de la dignité de l’individu est elle aussi, comme celle des bonnes mœurs, ou du droit, fluctuante.
Tant mieux : personne n'a la même définition de la dignité, les moeurs varient selon le lieu et l'époque. Nous sommes H+ tous les deux : pourquoi voudrais-tu que ta conception et ma conception du "+" soient les mêmes ?

Citation :

Une fois de plus, il me semble donc que le libre choix des personnes conscientes et rationnelles doit être encadré afin de lutter contre les dérives, les abus et les excès que la liberté individuelle ne manque jamais d’entraîner.
.

Non, pour les raisons expliquées plus haut. Le seul "encadrement", c'est la norme de sécurité et de qualité sur une technologie mise sur le marché. Ce que les gens font de cette technologie "sûre", c'est leur problème, ni le tien, ni le mien.
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MessageSujet: Re: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitimeMar 14 Oct - 19:13

Citation :
Marc avait écrit:
[…] le H+ est d’abord un humanisme et qu’à ce titre il promeut les droits de l’Homme au même titre que la plupart des déclarations des droits humains ?

Citation :
CMüller : Sur le second point : je ne me définis pas comme humaniste. Défendre les droits des individus ne signifie pas adhérer à une philosophie faisant de l'homme la fin ou la mesure de toute chose.

En effet. Je me dois de revenir sur cette proposition. Les Déclarations de Droits sont sans doute à réécrire à la lumière de la perspective H+ (travail passionnant à venir). Il faudrait probablement y remplacer la notion d’homme (ou d’humain) par celle d’individu …



Citation :
Citation: Marc :
Pour ma part, quand je précisais « y compris des enfants à naître » j’aurais plutôt dû formuler un questionnement. Si je fais le libre choix de recevoir une substance, gène, implant ou que sais-je qui me donne telle particularité (avoir la peau vert fluo par exemple), dont j’assumerai toutes les conséquences en connaissance de cause, ai-je le droit d’imposer ces conséquences à ma progéniture ? Cette question n’est pas rhétorique.

Citation :
CMüller : Si, je pense que c'est rhétorique : combien de personnes connais-tu qui souhaitent se mettre la peau en vert fluo et avoir une trompe, si tant est que cela possible ? Et quand bien même un jour nous aurions la possibilité d'être vert, en quoi avoir des enfants verts pour des parents verts serait un problème ?

C'est un peu le sophisme de l'excès, applicable à tout. Prenons une technique existante, la chirurgie esthétique : sur le papier, on peut craindre que des parents utilisent cette chirurgie pour changer le visage de leur enfant, leur ôter un oeil, une oreille, un nez, ou pourquoi pas donner des seins en silicone à une fillette de 6 ans. Mais évidemment, cela ne se passe jamais ainsi, on peut sur le papier mettre tous les cas de figure imaginables et définir comme problématique toutes les techniques imaginables.

Question non rhétorique puisque tu sembles y répondre par l’affirmative alors que je tends, a priori, à répondre par la négative. Néanmoins, à la réflexion, mon questionnement est peut-être encore trop vague.
Pour plus de précision, il faut retourner à ce que je disais à l’origine de cet échange :

Citation :
Marc a écrit :
Je suis également d’accord avec la méfiance de l’auteur quant à la revendication de certains H+ de pouvoir assumer une totale liberté en matière d’expérimentation sur leur propre corps ou celui de leur descendance. Pour moi, cette liberté doit simplement être la plus grande possible dans la mesure où elle respecte les droits des autres (y compris des enfants à naître) d’une part et où elle ne provoque pas des distorsions dangereuses pour la société d’autre part. Bien entendu, le problème est qu’on a pas trouvé d’excellente solution pour définir à coup sûr et par avance ce qui est dangereux et ce qui ne l’est pas …

Et la suite de mon message indiquait que, même pour les enfants, la chose me semblait possible dans le cas d’une société idéale.

Bien entendu, je suis d’accord pour considérer que la crainte des excès potentiels ne doit pas interdire le développement des techniques. Mais il ne me semble pas si facile de résoudre le dilemme entre liberté nécessaire au dynamisme de la société et précaution tout aussi nécessaire à la préservation de son équilibre.

Il se peut que la transition vers le « verdissement » des individus se passent sans problème. J’ai pensé depuis à l’exemple plus concret de populations, comme certains afro-américains ou –européens, qui cherchent à se faire blanchir la peau. Quand cela sera possible –si ce n’est déjà le cas ( ?), il arrivera sans doute que certaines familles souhaitent choisir d’avoir des enfants nés la peau blanche. Où est le problème ? Peut-être nulle part. Quand une transition se déroule en douceur, c’est tant mieux pour tout le monde. Chacun a le sentiment que ses droits sont respectés et tout va pour le mieux.

Pourtant la question demeure : que pouvons/devons « nous » faire lorsque une partie donnée des individus jouissant librement de leurs droits pose « problème » au reste de la société ?
Je ne pense pas que l’on puisse se contenter de dire :

Citation :
CMüller : Non, pour les raisons expliquées plus haut. Le seul "encadrement", c'est la norme de sécurité et de qualité sur une technologie mise sur le marché. Ce que les gens font de cette technologie "sûre", c'est leur problème, ni le tien, ni le mien.

Cette position me paraît idéaliste. Elle présume que l’ensemble de la population, ou du moins une nette majorité, soit d’une ouverture d’esprit admirable, rationnelle, pas envieuse pour deux sous, ni pour deux qualités génétiquement acquises. Je crains que la réalité présente et historique ne nous porte pas à tant d’optimisme.

Nous avons commencé (à peine) à travailler à ce que la société humaine reçoive le mieux possible les changements induits par ce que nous pourrions appeler la « Révolution anthropologique » ou « transhumaniste », mais je doute plus que fortement que la transition se fasse sans heurts. C’est pour cette raison que l’existence d’instances de régulation me paraît indispensable.

A l’occasion, et non de manière systématique, les États, nationaux ou trans-nationaux (N+ ?), seront probablement appelé à imposer des arbitrages dont certains limiteront ce que les gens voudraient faire, même de technologies « sûres ».

Autrement dit, je ne pense pas que notre perspective H+ puisse faire l’économie des préoccupation sociales, et POLItiques.
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MessageSujet: Re: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitimeVen 17 Oct - 22:01

En fait, des tas de gens posent déjà problème aux autres. Il n'empêche que les individus se répartissent par affinités dans les sociétés occidentales, sans trop de heurts, co-existent dans un même ensemble un branché californien et un red-neck texan, un trans' du Marais et un paysan de la Beauce, etc.

Si l'on commence à poser "l'acceptation sociale" comme une condition de la liberté individuelle, autant dire adieu à cette dernière : Homo sapiens version 1.0 et ses ancêtres ont été massivement programmés comme "primates de groupe" depuis quelques millions d'années. L'humain est donc en moyenne porté à normaliser (imposer / intégrer des normes), et cela peut aller en effet jusqu'à la persécution des déviants du groupe. Simplement, l'expérience historique montre que cette primauté du groupe sur l'individu, accomplie par l'Etat à l'époque moderne (et les Eglises à l'époque prémoderne), mène à la violence si elle n'est pas limitée par les droits fondamentaux des individus. C'est peut-être "idéaliste", mais je ne trouve pas que les régimes autoritaires ou totalitaires sont regardés comme des idéaux aujourd'hui.

En fait, les transitions vers le H+ vont sans doute se faire "en douceur", sans que la société perçoive d'un seul coup un changement abrupt. Un exemple concret à court terme. Une Californienne branchée a déjà subi 10 opérations de chirurgie esthétique à trente ans, et elle fabrique son bébé in vitro sur la base d'un catalogue de gamètes. Demain, elle pratiquera la thérapie génique ou cellulaire si cela lui permet de garder ses formes et de ralentir le vieillissement de son corps. Et elle prendra quelques options sur son bébé en forme de kit génétique de résistances aux maladies. Quant à son mari, il en aura marre de prendre des amphet' pour tenir ses rythmes impossibles, il choisira une nanogreffe cérébrale maintenant son cortex préfontal en éveil optimal. Quel changement? Le red-neck texan pressera un peu plus fort sa Bible dans ses mains en disant que c'est diabolique, et alors ? Les enfants de ce couple californien iront plus loin dans les modifications en fonction des évolutions technologiques disponibles, et ainsi de suite.

Tel que je l'imagine, le H+ sera d'abord le fait d'une minorité ayant l'envie (et les moyens) de dépasser les limites actuelles du corps, et que ce dépassement prendra des formes très diverses (mon exemple de branchés californiens ne sera peut-être pas celui d'un jeune Tokyoite, qui préférera connecter son cerveau à son ordinateur pour jouer, etc.).

Cela dit, on peut imaginer une idéologie politique "classique" posant comme enjeu de société (et enjeu démocratique de décision) une certaine forme d'eugénisme. Mais j'avoue que je ne suis pas à l'aise avec ce genre de posture, je ne vois pas comment un eugénisme démocratique pourrait déboucher sur une autre chose qu'une contrainte de la majorité sur la minorité en cas de succès. Or, je n'ai nulle envie d'une telle contrainte, nulle envie que l'appareil d'Etat dicte ce qu'il faut faire de son corps, quand bien même cet appareil représenterait 51% de mes semblables et quand bien même il serait H+.
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MessageSujet: Re: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitimeLun 20 Oct - 10:13

Citation :
Cmüller :En fait, des tas de gens posent déjà problème aux autres.
Auquel cas, les uns et les autres peuvent régler leur problème par le dialogue ou la violence, mais bien souvent en faisant appel au droit institué par leur communauté.

Citation :
Il n'empêche que les individus se répartissent par affinités dans les sociétés occidentales, sans trop de heurts

Il me semble que cette vision d’une société occidentale pacifiée manque d’un peu de recul. Dans les siècles passés, nos sociétés se sont entre déchirées bien souvent de manière paroxystique, notamment quand une communauté, nationale ou religieuse, s’est sentie irrationnellement menacée dans son identité. La situation actuelle, où les tensions sont relativement apaisées, ne dure que depuis quelques dizaines d’années, et les équilibres ne me paraissent pas si solides. Les mises en question imposées par l’évolution H+ vont arriver et s’accumuler dans un contexte de fragilisation sociale (peut-être d’avantage aux Etats-Unis qu’ailleurs). Les Red Neck et autres évangélistes radicaux ne vont pas disparaître avec la défaite possible du candidat républicain aux prochaines présidentielles.

Citation :
Si l'on commence à poser "l'acceptation sociale" comme une condition de la liberté individuelle, autant dire adieu à cette dernière : Homo sapiens version 1.0 et ses ancêtres ont été massivement programmés comme "primates de groupe" depuis quelques millions d'années. L'humain est donc en moyenne porté à normaliser (imposer / intégrer des normes), et cela peut aller en effet jusqu'à la persécution des déviants du groupe. Simplement, l'expérience historique montre que cette primauté du groupe sur l'individu, accomplie par l'Etat à l'époque moderne (et les Eglises à l'époque prémoderne), mène à la violence si elle n'est pas limitée par les droits fondamentaux des individus. C'est peut-être "idéaliste", mais je ne trouve pas que les régimes autoritaires ou totalitaires sont regardés comme des idéaux aujourd'hui.

Il me semble voir une contradiction entre d’une part le fait de ressentir « l’acceptation sociale » comme contraire à la liberté individuelle et d’autre part le fait de reconnaître que l’humain (1.0) est un animal grégaire imposant et intégrant des normes.
Depuis le XVIIIème siècle au moins, la pensée occidentale a formulé l’idée du « contrat social » comme garantie de la liberté individuelle. Ce genre de contrat me semble imposer de fait une « acceptation sociale ». Celui qui refuse la loi se retrouve immédiatement « hors la loi » et donc au ban de la société.

Je suis par contre tout à fait d’accord sur le danger que représente les totalitarismes de tous poils. Mais il ne me paraît pas raisonnable d’associer si vite l’action structurée d’une communauté, celle de l’État, au totalitarisme. Malgré ses dérives et ses corruptions, notre modèle d’organisation politique a pour moi l’avantage de posséder, au moins en théorie, un système d’équilibre des pouvoirs, de contre-pouvoirs, qui garantie justement les libertés fondamentales.
Un des arguments historiques qui explique la résistance des pays de l’Europe du nord-ouest et des Etats-Unis à la poussée ultra nationaliste et totalitariste de l’entre deux guerres est justement l’ancienneté et l’enracinement de la tradition démocratique dont ils jouissaient.
A mon avis, le danger totalitaire existe d’ailleurs tout autant dans la perspective de l’affaiblissement excessif, voire de la disparition de l’État. Or, il n’est pas dit que ce ne soit pas dans cette direction que nous nous dirigions à moyen terme …

Citation :
En fait, les transitions vers le H+ vont sans doute se faire "en douceur", sans que la société perçoive d'un seul coup un changement abrupt. […]

Il se peut que la plupart des modifications H+ se fassent en douceur. Mais il ne me paraît pas improbable que leur accumulation progressive fasse monter la pression. Des groupes bioluddites militants, parfois violemment, existent déjà. D’autre part, il arrive que des innovations techniques bouleversent rapidement les sociétés et sapent les fondements de leur équilibre.
i.e. L’industrialisation de la machine à vapeur par Watt date des années 1780. La rédaction du Manifeste du Parti communiste par Marx est de 1848. Dans ces 70 petites années, le machinisme, l’industrialisation ont provoqué l’exode rural, une urbanisation massive, la naissance de la classe ouvrière, la naissance du capitalisme et de la finance moderne et l’Europe a vu passer la Révolution française, les armées de Napoléon et le Printemps des Peuples …
Parfois, l’histoire s’emballe.


Citation :
[…] Le red-neck texan pressera un peu plus fort sa Bible dans ses mains en disant que c'est diabolique, et alors ?
Et alors, les deux derniers mandats républicains nous ont révélé ce que j’avais lu et avais entendu dire il y quelques années dans un séminaire sur l’évolution de la droite conservatrice américaine, à savoir que ces forces sociales et politiques ne se contentent pas de serer leur bible.
Imaginons (est-ce de la politique fiction ou bien simplement une prospective réaliste ?) dans une quinzaine d’années les Etats-Unis frappés par une nouvelle crise déclenchée celle-là par l’explosion d’une bulle spéculative sur la valeur des starts-up de l’écologie (déjà en vogue), un dollar cette fois abandonné par les investisseurs asiatiques ou du golfe, les premiers ayant atteint un volume de marché intérieur suffisant pour pouvoir larguer le déficit US (10.000 milliards de dollar !), enfin la pression sur les matières premières et notamment les hydrocarbures ne s’étant qu’aggravée. Autrement dit, imaginons simplement le jour où les Etats-Unis, comme avant eux l’Espagne, puis la France, puis l’Angleterre, devront descendre de leur piédestal. Dans cette société désemparée, jusqu’où iront les réactions des red-neck irrationnels à l’encontre des technoprogressistes qui remettent en cause leurs dogmes ? Se contenteront-ils d’assassiner les médecins pratiquant des avortements ou d’imposer l’enseignement du créationnisme ?

Citation :
Tel que je l'imagine, le H+ sera d'abord le fait d'une minorité ayant l'envie (et les moyens) de dépasser les limites actuelles du corps, et que ce dépassement prendra des formes très diverses (mon exemple de branchés californiens ne sera peut-être pas celui d'un jeune Tokyoite, qui préférera connecter son cerveau à son ordinateur pour jouer, etc.).

Sans doute.

Citation :
Cela dit, on peut imaginer une idéologie politique "classique" posant comme enjeu de société (et enjeu démocratique de décision) une certaine forme d'eugénisme. Mais j'avoue que je ne suis pas à l'aise avec ce genre de posture, je ne vois pas comment un eugénisme démocratique pourrait déboucher sur une autre chose qu'une contrainte de la majorité sur la minorité en cas de succès. Or, je n'ai nulle envie d'une telle contrainte, nulle envie que l'appareil d'Etat dicte ce qu'il faut faire de son corps, quand bien même cet appareil représenterait 51% de mes semblables et quand bien même il serait H+.

Un eugénisme démocratique fidèle aux principes démocratiques seraient respectueux des libertés individuelles, du droit des minorités et ne devrait pas voir l’État se préoccuper d’autre chose que de régulation et de maintien des meilleurs équilibres sociaux possibles.
Le problème est que le bon fonctionnement de l’État exige des citoyens un effort quotidien sur eux-mêmes afin de lutter : contre la tendance à sans cesse vouloir utiliser la force publique à son profit ; contre les dérives bureaucratiques ; contre la tendance de toute élite dirigeante (politique, économique, médiatique, syndicale …) à ne considérer comme déséquilibre social que ce qui met en danger ses « privilèges … ». Et c’est pas gagné !

PS : pour ma part, je ne sais pas encore si ce qui me préoccupe davantage est un eugénisme qui ne répondrait qu’à la recherche individuelle du bonheur ou une amélioration tous azimuts des sciences dans la perspective d’obtenir une pérennisation, pour ne pas parler d’une immortalité de la conscience …

Mais c’est sans doute un autre débat.
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MessageSujet: Re: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitimeMar 21 Oct - 15:24

Marc a écrit:

Il me semble que cette vision d’une société occidentale pacifiée manque d’un peu de recul. Dans les siècles passés, nos sociétés se sont entre déchirées bien souvent de manière paroxystique, notamment quand une communauté, nationale ou religieuse, s’est sentie irrationnellement menacée dans son identité. La situation actuelle, où les tensions sont relativement apaisées, ne dure que depuis quelques dizaines d’années, et les équilibres ne me paraissent pas si solides. Les mises en question imposées par l’évolution H+ vont arriver et s’accumuler dans un contexte de fragilisation sociale (peut-être d’avantage aux Etats-Unis qu’ailleurs). Les Red Neck et autres évangélistes radicaux ne vont pas disparaître avec la défaite possible du candidat républicain aux prochaines présidentielles.

La question est de savoir sur quoi débouchent les désaccords en question. Je ne pense pas que le conflit va disparaître miraculeusement des sociétés humaines. Mais la conscience post-identitaire développée dans les sociétés modernisées est-elle un feu de paille ou va-t-elle durer ? (Par post-identitaire, j'entends l'idée que les individus acceptent moins de mourir ou de tuer pour une idéologie, une nation, une religion ; et notamment parce que les anciens groupes ont été fragmentés par le processus de modernisation / rationalisation, au profit de micro-groupes genre associations, entreprises, etc., qui satisfont le désir d'appartenance d'Homo sapiens mais avec un potentiel belligène moins fort que l'ère des masses politisées).


Citation :

Il me semble voir une contradiction entre d’une part le fait de ressentir « l’acceptation sociale » comme contraire à la liberté individuelle et d’autre part le fait de reconnaître que l’humain (1.0) est un animal grégaire imposant et intégrant des normes.
Depuis le XVIIIème siècle au moins, la pensée occidentale a formulé l’idée du « contrat social » comme garantie de la liberté individuelle. Ce genre de contrat me semble imposer de fait une « acceptation sociale ». Celui qui refuse la loi se retrouve immédiatement « hors la loi » et donc au ban de la société.

Oui mais tout dépend ce que tu mets dans les termes du contrat. Personnellement, je suis disposé à vivre avec mes semblables sur la base d'un contrat minimal (droits de l'homme garantis par un Etat). Voire plus dans de petites communautés se dotant de règles choisies pour des membres choisis. Mais l'idée du "Big Government" règlant les détails de l'existence d'une masse, cela me semble contraire à la liberté individuelle. Du moins à la conception que je m'en fais, assez poussée il est vrai (on peut bien sûr considérer que la liberté de l'individu n'est pas la valeur la plus importante de la théorie sociale et politique, chacun ses choix en ce domaine).


Citation :
(...) Il se peut que la plupart des modifications H+ se fassent en douceur. Mais il ne me paraît pas improbable que leur accumulation progressive fasse monter la pression. Des groupes bioluddites militants, parfois violemment, existent déjà. D’autre part, il arrive que des innovations techniques bouleversent rapidement les sociétés et sapent les fondements de leur équilibre. (...) Parfois, l’histoire s’emballe.

Oui. Ce qui ressemble le plus à une idéologie de réaction aux progrès techniques serait l'écologisme politique d'une part, l'intégrisme religieux d'autre part. J'ai du mal à y voir le même potentiel que le marxisme.


Citation :
Imaginons (...) Dans cette société désemparée, jusqu’où iront les réactions des red-neck irrationnels à l’encontre des technoprogressistes qui remettent en cause leurs dogmes ? Se contenteront-ils d’assassiner les médecins pratiquant des avortements ou d’imposer l’enseignement du créationnisme ?

Je ne sais pas, mais il faut aussi imaginer ce qui se passera, au même moment, en Chine, en Inde, au Brésil, en Afrique... A mesure que le monde devient polycentré, c'est de partout que vont émerger des choses intéressantes.
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MessageSujet: Re: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitimeSam 25 Oct - 17:55

Citation :
La question est de savoir sur quoi débouchent les désaccords en question. Je ne pense pas que le conflit va disparaître miraculeusement des sociétés humaines. Mais la conscience post-identitaire développée dans les sociétés modernisées est-elle un feu de paille ou va-t-elle durer ? (Par post-identitaire, j'entends l'idée que les individus acceptent moins de mourir ou de tuer pour une idéologie, une nation, une religion ; et notamment parce que les anciens groupes ont été fragmentés par le processus de modernisation / rationalisation, au profit de micro-groupes genre associations, entreprises, etc., qui satisfont le désir d'appartenance d'Homo sapiens mais avec un potentiel belligène moins fort que l'ère des masses politisées).

Je souhaite que l’avenir te donne raison, mais dans le doute il nous faudra bien garder les structures régulatrices telles que celles assumées par l’État.

Citation :
Oui mais tout dépend ce que tu mets dans les termes du contrat. Personnellement, je suis disposé à vivre avec mes semblables sur la base d'un contrat minimal (droits de l'homme garantis par un Etat). Voire plus dans de petites communautés se dotant de règles choisies pour des membres choisis. Mais l'idée du "Big Government" règlant les détails de l'existence d'une masse, cela me semble contraire à la liberté individuelle. Du moins à la conception que je m'en fais, assez poussée il est vrai (on peut bien sûr considérer que la liberté de l'individu n'est pas la valeur la plus importante de la théorie sociale et politique, chacun ses choix en ce domaine).

Bien d’accord. Mais il reste ensuite à s’entendre sur ce que l’État se doit de prendre en charge pour que les droits de l’homme soient effectivement garantis. Mais là aussi, c’est un débat qui n’est pas lié à la problématique du transhumanisme.

Citation :
Oui. Ce qui ressemble le plus à une idéologie de réaction aux progrès techniques serait l'écologisme politique d'une part, l'intégrisme religieux d'autre part. J'ai du mal à y voir le même potentiel que le marxisme.

A propos de l’écologisme politique, il me semble qu’il ne faut pas mettre tout le monde dans le même sac recyclable, mais trier les déchets ;-)
J’ai suivi l’écologisme politique avec intérêt pendant plusieurs années. Si on y trouve peut-être bon nombre de luddites bornés, on y trouve aussi des personnes à la fois inquiètes des rapides applications des nouvelles technologies, soucieuses de voir appliquer au moins le principe de précaution mais pas forcément opposées au progrès technique. Elles demandent sans doute à être ménagées.
L’intégrisme religieux me paraît plus difficile à retourner, mais ce n’est peut-être pas impossible. Une approche comme celle de Teilhard de Chardin par exemple pourrait permettre de créer des passerelles.
Quant au marxisme, ou en tout cas la pensée marxienne ou post-marxienne, il se peut qu’elle fasse en effet encore parler d’elle …

Citation :
Je ne sais pas, mais il faut aussi imaginer ce qui se passera, au même moment, en Chine, en Inde, au Brésil, en Afrique... A mesure que le monde devient polycentré, c'est de partout que vont émerger des choses intéressantes.

Oui, je suis curieux de voir ça. Il est aussi possible que certaines orientations politiques originales proviennent de ces régions. Mais j’ai également à l’esprit certaines analyses qui avancent, non sans raisons, que ces pôles en croissance, notamment la Chine, l’Inde et l’Afrique subsaharienne sont en même temps des foyers de forte instabilité.


Enfin, je voudrais en revenir aux questions qui ont animé cette discussion et voir si nous pourrions, en une courte synthèse, en retenir quelque chose :

Donc, nous sommes partis de l’article de Klaus-Gerd Giesen proposé par Cyberspy que nous avons tous deux critiqué en signalant ses manques ou ses généralisations hasardeuses.
Nous nous sommes accordés sur la nécessité de démystifier le H+.
Nous nous sommes accordés à dire qu’en matière de défense de droits, l’important est davantage celle des droits de l’individu que celle des droits de l’homme.
Nous avons précisé, et accordé, nos positions à propos de la crainte de mutations génétiques héréditaires incontrôlées (Elles ne sont pas à craindre a priori, mais leurs conséquences sociales doivent être anticipées ou corrigées).
Tu as avancé que la transition H+ devrait être souple. J’ai mis en avant quelques facteurs de risques et de déséquilibre.
J’ai argumenté sur la nécessité d’une régulation par l’intermédiaire de superstructures de type étatique. Tu as fais part de ta crainte face à la tendance liberticide des États, sans remettre en cause la nécessité de ce genre de structure régulatrice.

Ai-je oublié quelques chose d’essentiel ?
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cmuller




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MessageSujet: Re: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitimeDim 26 Oct - 16:32

Cette synthèse me paraît correcte.

D'un point de vue pragmatique, les H+ gagneraient à faire une liste assez précises des figures rhétoriques / sophistiques qui leurs sont couramment opposées.

Par exemple dans le texte dont nous débattions :

"Hormis que l’humain n’est plus destiné à devenir meilleur par l’éducation (humaniste), et le monde par des réformes sociales et politiques, mais simplement par l’application de la technologie à l’espèce humaine."

Faux. Les H+ n'émettent aucun jugement dépréciateur sur la dimension acquise / environnementale / éducative / culturelle, ils se contentent de souligner que l'intervention directe sur la biologie humaine possède elle aussi des potentiels appréciables pour les individus. En réalité, ce sont les adversaires des H+ qui entendent déprécier / diaboliser cette dimension biologique et technologique, pour des raisons assez mystérieuses. Par exemple, si l'éducation a pour but (parmi d'autres) de développer notre intelligence, pourquoi une pilule ou un implant aidant à accomplir ce même but serait blâmable ? Si devenir plus intelligent est condamnable en soi, il faut aussi condamner l'éducation. Sinon, il faut développer tout ce qui y concourt, pas seulement l'éducation.


"Nous y trouvons aussi le vieux fantasme eugéniste selon lequel la valeur intrinsèque d’un être humain se mesure à l’aune de la qualité de sa base héréditaire."

Faux. La base héréditaire d'un individu ne détermine aucune "valeur", simplement des prédispositions à des traits observables. La valorisation de ces traits ne relève pas de l'hérédité, mais de jugements individuels et sociaux. Si ces traits sont indifférents, pourquoi les femmes des sociétés développées recourent-elles aux diverses techniques de diagnostic prénatal ou pré-implantatoire? Sont-elles toutes soumises au "fantasme eugéniste", ou simplement soucieuse de mettre au monde des enfants dans les meilleures conditions possibles (pour le bien futur de ces enfants, bien dont l'appréciation relève des parents)? Et qui peut se permettre de les en blâmer, se prétendant ainsi maître de ce que les autres devraient faire ou ne pas faire dans l'un des domaines les plus intimes de l'existence, la reproduction?

Etc. Etc.
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Marc




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MessageSujet: Re: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitimeMer 29 Oct - 11:25

Citation :
Marc :
Donc, nous sommes partis de l’article de Klaus-Gerd Giesen proposé par Cyberspy que nous avons tous deux critiqué en signalant ses manques ou ses généralisations hasardeuses.
Nous nous sommes accordés sur la nécessité de démystifier le H+.
Nous nous sommes accordés à dire qu’en matière de défense de droits, l’important est davantage celle des droits de l’individu que celle des droits de l’homme.
Nous avons précisé, et accordé, nos positions à propos de la crainte de mutations génétiques héréditaires incontrôlées (Elles ne sont pas à craindre a priori, mais leurs conséquences sociales doivent être anticipées ou corrigées).
Tu as avancé que la transition H+ devrait être souple. J’ai mis en avant quelques facteurs de risques et de déséquilibre.
J’ai argumenté sur la nécessité d’une régulation par l’intermédiaire de superstructures de type étatique. Tu as fais part de ta crainte face à la tendance liberticide des États, sans remettre en cause la nécessité de ce genre de structure régulatrice.
Citation :
cmuller
Cette synthèse me paraît correcte.

Je conserve donc les idées programmatiques suivantes :

- Œuvrer à démystifier le H+.
- Faire prévaloir la notion d’ « individus conscients » sur celle d’ « humains ».
- Affirmer la nécessité d’instances de régulation démocratiques propres à limiter/corriger les excès et dérives des évolutions (transhumanistes et autres …) à venir.

Citation :
D'un point de vue pragmatique, les H+ gagneraient à faire une liste assez précises des figures rhétoriques / sophistiques qui leurs sont couramment opposées.

Je suggère de transférer vers un autre fil la réflexion en vue de l’établissement d’une telle liste. Il te suffirait de copier tes deux exemples et d’en faire le premier message d’un nouveau fil …
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MessageSujet: Re: Transhumanisme et Génétique humaine   Transhumanisme et Génétique humaine Icon_minitime

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